mardi 26 mai 2009

"Résistance !" de Frédéric D.

Le dimanche 17 mai à Paris, lors du « printemps des RASED » organisé par la FNAREN, nous étions une vingtaine d’irréductibles Ch’ti mi à la tête d’un pauvre cortège d’une centaine de Gaulois tout au plus, les derniers des Mohicans… pour manifester une dernière fois notre colère aux portes du ministère : dernier coup de gueule avant l’été, dernier baroud d’honneur.
Franck, Sylvie, les deux Jacques, Cécile, Anne, Véronique, Valérie, Monique, Vincent, … et les autres, les militants de la première heure qui, tout au long de cette année, auront consacré tellement de leur temps pour mener ce combat pour la défense des Réseaux d’Aide. Sans compter celles et ceux qui n’ont pas pu se libérer ce jour-là : les Laurent, Geneviève, Dominique, Marie-Agnès, Nadine, Corinne, Caroline, Christine, Manu, Jean-Michel, Marie, Didier, Pierre et bien d’autres encore… qui ont été de toutes les AG, les conseils d’école, les audiences, de toutes les grèves, les manifestations à Lens, Arras, Lille, Paris ; ils y ont laissé un peu d’argent, un peu de sérénité, un peu de disponibilité pour leurs proches…
A ceux-là, je voudrais dire merci. Je voudrais leur dire combien je suis fier d’avoir été des leurs, dans ces actes de résistance. Si les conséquences de ses mesures n’étaient pas si graves pour l’avenir des RASED, j’en arriverais presque à remercier le sinistre Darcos de nous avoir donné l’occasion de montrer qu’il reste encore, dans cette société individualiste et consumériste, des gens attachés à l’action collective, des gens qui ont gardé leur capacité d’indignation, des gens qui croient encore aux valeurs de l’école publique.
Merci également aux militants des différentes organisations syndicales et responsables politiques qui ont, souvent discrètement, accompagné, soutenu, encouragé ce mouvement, par conviction avant tout. Car c’est bien de cela dont il s’agit.
Les mauvaises langues diront que nous n’aurons fait que défendre nos postes, (des postes de « planqués » ajouteront ceux qui n’ont jamais rien voulu comprendre à l’enseignement spécialisé) : alors que nous nous sommes battus pour préserver l’idée que nous nous faisons de l’Ecole (ou de ce qu’elle devrait être) et qui a quelque chose à voir avec ce qu’on pourrait appeler « les Droits de l’Elève ». Cet élève, c’est celui que nous avons été, ce sont nos enfants, et c’est surtout le plus fragile de tous sur lequel l’Ecole doit faire l’effort de se pencher, pour le hisser au maximum de ses possibilités.
Ce combat était sans doute perdu d’avance, quand certains représentants de notre hiérarchie, prompts à exécuter sans états d’âme les injonctions ministérielles, nous ont regardé avec condescendance, comme autant d’arriérés, de « ringards » incapables d’évoluer et de s’adapter aux exigences du monde d’aujourd’hui. Pour ceux-là, nous appartenons d’ores et déjà à un passé révolu... Mais sont-ils vraiment dignes de conduire notre Institution ? Ceux-là même qui ont contribué à la création du dispositif RASED, mais qui ne lui ont pas permis de se développer suffisamment pour être opérationnel, qui n’ont même pas su le légitimer à l’interne ! Ceux-là même qui ont contribué à nous former, parfois, auront été les premiers à nous lâcher, sous prétexte d’objectivité, cédant à l’idéologie de la rentabilité, au dictat de l’évaluation et de la statistique, à la logique économique et à sa réalité soi-disant incontournable…
Une logique à court terme pourtant : lorsque les adeptes de la marchandisation de l’éducation, actuellement au pouvoir, auront achevé de dévitaliser le service public d’éducation, au bénéfice de l’école « libre » ; lorsqu’il ne sera plus possible d’offrir un enseignement de qualité et que tous ceux qui en auront les moyens inscriront leurs enfants dans les établissements privés, condamnant ainsi toute possibilité de mixité sociale ; lorsqu’on aura renoncé à soutenir la recherche et à former des enseignants pour lutter contre la grande difficulté scolaire, abandonnant toute une frange de la population à la désespérance… qu’aurons-nous gagné ? Cette politique-là aura, peut-être plus vite qu’on ne croit, un coût social énorme en produisant au sein de la société une véritable tumeur prête à répandre ses métastases, à libérer une énergie de révolte violente, destructrice…
Car enfin, à qui fera-t-on croire qu’on peut améliorer le système éducatif en l’affaiblissant ?
C’est pourquoi la mobilisation devra retrouver le même élan à la rentrée de septembre, pour continuer de s’opposer au programme de démantèlement de la fonction publique engagé par ce gouvernement, avec par exemple le non-remplacement d’un départ sur deux à la retraite.
Mobilisation citoyenne pour convaincre l’opinion publique de la dangerosité de ces réformes ultralibérales ; mobilisation pour supplier la classe politique de sortir de son immobilisme, de redoubler son effort de réflexion, de faire preuve de créativité pour inventer de nouvelles propositions afin de réduire les injustices qui ne cessent de s’accroître quand on abandonne le pouvoir aux mains de la finance ; pour garantir l’équilibre de la démocratie, toujours vulnérable en temps de crise.
Aujourd’hui, celles et ceux qui croient à la nécessité d’un service public d’éducation de qualité n’ont pas d’autre choix que celui de la résistance

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